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Chaque enfant évolue à son rythme

Publié sur 2 Commentaires 7 min. de lecture

Le piège à scroller les fils d’actualités Instagram ou autres réseaux sociaux, c’est la comparaison. Elle survient en chacun de nous sur tous les sujets : comment fait-elle pour avoir de si jolies jambes ? Ils partent encore en vacances alors qu’on a le même job, comment font-ils ? … Il y a dans ces réflexions une empreinte de jalousie mais aussi des remises en questions, parfois salvatrices, d’autres fois culpabilisatrices. Lorsqu’on est jeune maman et qu’on s’intéresse soudain de plus près aux hashtags #maman, #kids et #bébé sur Instagram, on peut vite tomber dans cette comparaison, celle des autres bébés avec le nôtre, celle des progrès des autres bambins avec ceux du nôtres. C’est salvateur lorsque par exemple ça nous donne une idée de quoi faire avec son enfant selon sa tranche d’âge… C’est pernicieux lorsqu’on se met à s’interroger sur le bon développement de son enfant…

Ce phénomène de comparaison, je l’ai trouvé sur les réseaux sociaux mais pas seulement. Il existe aussi avec l’entourage proche ou même, dès la naissance avec le personnel de la maternité.

« Votre enfant prend-il correctement le sein ? »
« Grossit-il comme il le doit ? + 100 g, youpi ! Moins 100 g, attention à ce qu’on ne vous garde pas encore 3 jours supplémentaires ! »
« Combien mesure-t-il et a-t-il encore le réflexe de la marche ? »

Tant de questionnements se sont abattus sur nous, ses parents, et sur notre bébé, dès ses quelques heures de vie, tout cela pour vérifier s’il était « normal » et s’il évoluait « normalement ». Passés ces tests oppressants de « normalité » et de retour à la maison, il est souvent arrivé (et ça continue) que les remarques et questions des proches soient écrasantes… « Et bien, à chaque fois que je viens, cet enfant dort ou tète, est-ce normal ? »… 

Mon fils Pierre a grandi et au cours de ses premiers mois, ce sont les étapes de son développement qui ont été sujettes à évaluation. Le cap du lever de tête, puis celui de la position assise en passant par le retournement et pour finir la marche. Pendant que certains parents abusent du mot fierté pour parler d’acquisitions physiologiques de la motricité, Pierre a cheminé  doucement mais sûrement, à son rythme, pour faire ses premiers pas à 14 mois et réellement marcher à 15 après deux mois de 4 pattes… De notre côté, on était des parents cool sur le sujet mais on a reçu des « et bien, il n’est pas en avance, celui-là! » parmi un florilège du même genre.

En parallèle, Pierre savait tenir une cuillère et manger seul bien avant de savoir marcher (vers 13 mois). Je me souviens d’ailleurs avoir publié une photo sur Instagram de mon fils mangeant seul (photo coupée au-dessus de la bouche). Les commentaires à l’époque avait déjà commencé à me faire réfléchir sur le partage des progrès de mes enfants : « Pierre mange tout seul avec une cuillère, ah bon? mais quel âge a-t-il ? ». Je lisais au travers ces commentaires, puis dans les échanges, la comparaison avec leurs propres enfants voire une inquiétude. Pierre a toujours évolué calmement en motricité et je ne pense pas que ce sera un casse-cou. En revanche, il a toujours été en avance pour le coup de fourchette et le langage. On nous a souvent dit « qu’est-ce qu’il parle clairement pour son âge! ». Est-ce normal ? Pourquoi n’acceptons-nous pas que chaque enfant évolue à son rythme et que faire ceci ou cela, quelques mois avant les autres, n’est pas un signe d’une plus grande intelligence ? Un chevreau marche à la naissance après tout… Les petits humains ne peuvent pas tout faire en même temps…

Pierre a soufflé ses 3 bougies avec une couche sur les fesses puisqu’il n’était toujours pas propre. Chaque fois que j’avais une discussion avec une autre femme (oui les hommes sont toujours plus relax sur le sujet) durant tout l’été 2018, il y avait la fameuse question « alors il est propre ? ». Ma réponse négative provoquait chez mon interlocutrice la question « ah, et il rentre à l’école en septembre ?! » En fait, le fait que mon fils n’était pas propre, alors que d’autres enfants l’avaient été plus tôt que lui, avait tendance à stresser… les autres ! Et par ricochet, je l’étais aussi mais je ne m’éternise pas sur le cas de la propreté, je vous ai raconté les évènements dans ce billet

Toujours concernant Pierre, la petite section de maternelle n’a pas su le passionner des activités de peinture et coloriage. Sa maîtresse avait cru bon de nous le souligner, le décrivant comme « pas très dégourdi » et « dans la lune »… J’ai bêtement eu envie de répondre « s’il n’est pas rêveur à 3 ans, quand le pourra-t-il ?« . Je voyais en story Instagram des petites filles du même âge dessinant des bonhommes colorés et Pierre préférait encore tripoter la peinture avec ses doigts… J’avais beau avoir déjà fait de nombreuses activités avec mon fils pour savoir que rien ne clochait, il était trop tard, la graine avait germé. Alors j’ai passé des jours à me demander s’il n’était pas en retard, s’il serait bon à l’école, etc. J’en rigole maintenant! 

Quelques mois plus tard, la même maîtresse m’a souligné qu’il était l’élève à connaitre le plus de lettres de sa classe et qu’il savait très tôt écrire son prénom… Il n’était toujours pas passionné de peinture. Et alors ? Elle ne savait pas qu’il adorait aussi répondre aux questions de ses cahiers d’activités, qu’il inventait des histoires avec beaucoup de créativité, qu’il aimait rester plongé plus d’une demie-heure dans un livre, construire de grandes phrases. Elle ignorait sa capacité à nous raconter dans des détails ultra-précis un évènement datant d’un an en arrière, qu’il chantait par cœur Petit Papa Noël à 2 ans et demi alors retenir le poème de la fête des mères à 4 ans, c’était les doigts dans le nez! 

C’est en moyenne section à la Toussaint 2019 qu’il a démontré un intérêt certain pour le coloriage, le dessin et surtout les lettres attachées après avoir adoré les LEGO version classique tout l’été ! Et alors ? 

En parallèle, il connait beaucoup de dinosaures et sait plein de choses sur les chiens et les ours, il sait m’épeler banane sans le voir écrit sur une feuille, juste lorsqu’on lui articule le mot… À 4 ans et demi, il a le sens du goût plus affuté que certains adultes que je connais et a plein de connaissances sur le potager et les vergers….À 4 ans et demi, il sait très bien s’occuper de sa petite sœur et en prendre soin pour qu’il ne lui arrive rien. Il a conscience à son jeune âge de ce qui est dangereux pour elle et sait nous interpeler s’il pense qu’elle n’est pas en sécurité. Et je pourrais citer encore plein de choses… Sur les réseaux sociaux, je vois plein d’autres enfants qui, au même âge, ne savent pas faire ce qu’il gère très bien et j’observe aussi ces mêmes enfants plus avancés sur d’autres points. Aujourd’hui, tout ça m’attendrit davantage que ça me perturbe car je sais que chaque enfant développe ses capacités et compétences à son rythme (j’exclue ici les réels soucis de développement bien sûr). 

Pour Juliette, à 8 mois, on m’a demandé « Ah bon, elle ne se met pas de allongée à assise toute seule? ». Bah elle tient assise (comment ça, ça n’est pas suffisant?). Et tenez-vous bien : ma fille a eu 17 mois, et vient juste de faire 3 ou 4 pas d’affilés, seule. En revanche, elle ne marche toujours pas. Tic, tac, tic, tac, est-ce normal ? Elle réclame que quelqu’un lui tienne la main mais refuse de se lancer pour de bon ! Pourtant, Instagram regorge de photos d’enfants qui marchent au même âge, qui font des trucs qu’elle ne maîtrise pas ou qui ne savent pas faire des trucs sur lesquels elle est en avance. C’est pour cela que les photos avec carte étape mois par mois ont commencé à me déranger au cours de sa première année. Décrire ses petits et grands progrès suscitait des « ah bon? et comment ça s’est passé ? »… 

Aujourd’hui avec de l’expérience, les comparaisons ne me font rien, je ne suis pas inquiète. Je suis pour la motricité libre et je sais qu’elle marchera tôt ou tard. J’ai confiance en elle et je suis attristée de toutes les questions qui commencent pas « est-ce normal que …? » lorsqu’on parle des tous petits alors j’évite même tant que possible les comparaisons entre mes deux enfants.

Tous les deux sont des enfants si observateurs, et rêveurs avec tellement de douceur. Ce qui est formidable avec les enfants, c’est leur unicité. Qu’ils marchent à 11 ou 18 mois, notre rôle est de les accompagner pour qu’ils deviennent de belles personnes et ceux qu’ils ont envie d’être. Ils sont comme ils sont et ils ont tout leur temps pour découvrir la vie, chacun à son rythme. 

Et toi, tu fais des comparaisons sur le rythme de développement de ton enfant avec ceux des autres ? Trouves-tu ces comparaisons anxiogènes ?

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2 Commentaires
  • Delphine
    janvier 8, 2020

    Merci Justine pour ce bel article plein de bons sens et tellement réaliste!

    Il m’est arrivé (et il m’arrive toujours) de comparer, que ce soit avec les enfants des autres sur les réseaux, ceux de mes amis et même parfois entre mes 2 petits loups.. J’essaye à chaque fois de me raisonner, chacun va à son rythme et tant qu’ils vont bien j’en suis la plus heureuse.

    Nous en parlions justement ce matin au travail avec un collègue dont les enfants ont le même âge que les miens, c’est très difficile aujourd’hui car on demande tellement aux enfants, que tout aille vite, qu’ils marchent à 10 mois, parlent à 18 et soit propre à 24 (oui et puis qu’à 3 ans ils sachent lire évidemment..) J’exagère volontairement le trait mais on en est parfois pas si loin..

    Nous ne mettons pas de pression aux enfants la dessus, on les accompagne, on propose des activités pour l’éveil, la curiosité, ou continuer un travail fait à l’école, on joje, on sort ..mais ils sont bien trop jeunes pour avoir une telle pression.. et parfois l’école est plutôt moyenâgeuse sur beaucoup de points (l’école c’est bien mais l’école de la vie c’est bien aussi!)

    Comme tu l’expliques si bien chaque enfant va à son rythme et a aussi ses préfèrences (bah oui moi j’aimais pas les maths lol)

    Merci pour ce bel article qui permet de refaire une petite mise à jour :-)
    Bisous

    Delphine

    • Justine
      janvier 13, 2020

      Salut Delphine,
      Merci pour ton retour d’expérience et je t’embrasse.
      Justine